Habib El
Malki était, comme d’habitude, jovial et serein. Mais, les
premiers propos du ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement
supérieur, de la Formation des cadres et de la Recherche scientifique,
lors du point de presse qu’il a animé, lundi 19 juillet 2004,
laissaient penser que l’homme a été passablement affecté par l’énorme tapage orchestré autour du « gâchis
» des examens du baccalauréat 2004. Ainsi M. Malki a tenu,
d’entrée de jeu, à s’inscrire en faux contre ces
évaluations, à ses yeux, inexactes.
Le Bac reste, il est vrai, comme le décrivait, autrefois, Pierre
Loti, ce «petit examen affreux», mais ses résultats,
cette année au Maroc, n’avaient rien d’extraordinaire.
Ils étaient plutôt «objectifs et normaux et correspondent
à l’état d’avancement des réformes entreprises
dans le système éducatif», affirmait avec insistance
le ministre. Le taux général de réussite à l’échelle nationale, est de 42,70% soit 91.076 élèves
dont presque la moitié sont des filles. Mais, ce ne fut pas l’unique
clarification de M. Malki. Deux autres « révélations
» méritent d’être soulignées. Les élèves
de l’enseignement public ne sont pas, contrairement à une
idée répandue, moins brillants ou plus mauvais que leurs
homologues dans les établissements privés. Preuve : le taux
de réussite dans l’enseignement public de l’ordre de
45,87% est supérieur à celui de l’enseignement privé.
Passage
La deuxième
révélation, plus ou moins paradoxale : la réussite
dans les branches scientifiques, réputées ardues, est plus
grande que dans les filières littéraires. Ainsi, explique
le ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche scientifique, 92,9% des candidats
en sciences mathématiques ont effectivement réussi leur
passage à l’Université, tandis que seuls 33,56% des
candidats au Bac littéraire auront la possibilité, lors
de la prochaine rentrée, de s’inscrire dans les établissements
de l’enseignement supérieur. Le taux de réussite dans
les branches techniques et industrielles, de l’ordre de 67,57%, est
fort acceptable. Les élèves de la filière Arts et
industrie de l’imprimerie, indique Habib El Malki, ont enregistré un taux de réussite exceptionnel.. de 100%.
Rien donc d’alarmant. Au contraire, à en croire le ministre,
les résultats du Bac 2004 étaient pratiquement conformes
aux pronostics et aux attentes du département de l’Éducation.
Le taux de ratage dans les filières littéraires n’aura
surpris personne dans ce ministère. Car, ce sont des branches qui
continuent de draîner un nombre immense d’élèves,
incomparable avec celui des adolescents qui poursuivent des filières
scientifiques et techniques.
Réforme
La cause
de ces échecs réside, donc, dans la mauvaise orientation.
Les stratèges de l’Éducation dans le Royaume en avaient
conscience depuis longtemps. La charte de l’enseignement, document-référence
en la matière, ne soulignait-elle pas la nécessité d’ouvrir le système de l’enseignement sur son environnement
économique et culturel. Ne préconisait-elle pas un équilibre
entre les options du bac national ? Habib El Malki fustige implicitement
ceux qui sont allés vite en besogne en condamnant le nouveau système
d’enseignement prévu dans la réforme de l’éducation
en cours au Royaume. «La réforme vient de commencer. Elle
n’est qu’à sa quatrième année. Il faut
au moins 18 ans pour concrétiser tous ses objectifs», estime
le ministre. Celui-ci a, par ailleurs, fait état, au cours de son
point de presse, de plusieurs mesures salvatrices que son département
entend prendre prochainement. Aussi, indique-t-il, «nous allons
tout faire pour que le baccalauréat expérimental se passe
dans les meilleurs conditions». «Cela, ajoute M. Malki, va
permettre aux enseignants de corriger certains aspects: cours, nature
des épreuves..». Le ministère serait décidé,
notamment, à développer l’enseignement public. Pour
ce faire, il compte, entre autres, selon le ministre, dispenser des cours
d’appui et de soutien en faveur des élèves ayant des
difficultés d’apprentissage tout en incitant ceux-ci à la fréquentation des bibliothèques.
Le ministre a égratigné les élèves et, par
leur biais, les parents insouciants quand il a critiqué la négligence,
la paresse et le culte du moindre effort, assez répandus dans les
rangs des lycéens. «La manière dont les étudiants
préparent les examens n’est pas adéquate. Il faut qu’ils
reprennent les bonnes habitudes. Il faut qu’ils sachent que le baccalauréat
se prépare en deux années», a martelé Habib
El Malki , qui avait, en outre, annoncé l’intention de son
département d’encourager l’enseignement privé.
Il s’agit, semble-t-il, de préparer les meilleures conditions,
sur le double plan pédagogique et logistique, pour favoriser le
succès de l’année scolaire prochaine qui sera, en fait,
une année de transition, vers la seconde moitié de la décennie
de l’éducation et de la formation.
Conditions
Patron du
département de l’Éducation, depuis moins d’une
année, Habib El Malki, ancien président du défunt
Conseil national de la jeunesse et l’avenir (CNJA), était
rassurant sur l’évolution des choses au niveau de son ministère.
Outre «la normalité» des résultats du Bac 2004,
l’homme s’est longuement félicité des progrès
enregistrés dans l’enseignement primaire où le taux
de réussite était de 88,15%, soit 446.335 élèves.
Il a également relevé, dans le même registre, que
le taux de passage de collèges aux lycées, au Royaume, est,
cette année, de l’ordre de 50,97. Mais, le taux de passage
en soi d’une année à l’autre ou d’un niveau
de l’enseignement à un autre, ne doit pas occulter, selon
El Malki, le souci de qualité de l’enseignement et le sérieux
des examens, pré-requis pour préserver et renforcer la crédibilité des diplômes marocains.
Ce qui implique, bien évidemment, comme l’a souligné le ministre, à juste titre, une poursuite de la révision
du système basée sur deux mots clés : « rigueur
et responsabilité ». Des qualités qui devront, affirme
El Malki, prévaloir à tous les niveaux de l’examen
de la préparation à l’annonce des résultats
en passant par l’élaboration et la correction. Exaltant chantier.